jeudi 17 mars 2011

Lettres ouvertes au président imaginaire du Gabon André Mba Obame

Lettre ouverte au Président AMO : « Réponse à une imposture »



Très cher Président André Mba Obame,


Ce jour, je prends sur moi de te confier ce que ta dernière aventure m’inspire, piquée que je suis par l’extraordinaire débâcle sur laquelle elle a débouché.
Voici une tempête dans un verre d'eau qui s'achève en pantalonnade !
A l’entame de mon analyse, deux auteurs m’emplissent spontanément l’esprit. Un dont tu t’es inspiré : « La stratégie consiste à continuer de tirer pour faire croire à l'ennemi qu'on a encore des munitions (Michel Chrestien, 1915-1991) » et un autre dont tu aurais dû t’inspirer : « vouloir élaborer la stratégie sur la base d'une démarche mécanique ne peut aboutir qu'à des résultats médiocres (Henry Mintzberg) ».


Car à l’épilogue, de quoi parlons-nous ?
Entré en fanfare dans les locaux du PNUD à Libreville toi, AMO, en ressort par la petite fenêtre, surpris de ne pas avoir provoqué la révolution de tomates que tu espérais. Sauvé par une immunité conférée sous le joug d’un pouvoir que tu dis illégitime et incompétent, toi, le député de Medouneu, tu t’es surpris à tourner en rond dans les salles glacées du PNUD un mois durant !


Surpris aussi de constater que la république pouvait fonctionner sans toi, que les Gabonais, mine de rien, s’en allaient au travail chaque jour, malgré des appels à la grève enragés que tu lançais avec un porte-voix privé de ses piles alcalines.
Seul bénéfice inattendu, qui entrera certainement dans les prochaines statistiques sur l’IDH : le PIB au mètre carré des locaux du PNUD a été multiplié par 80, au regard de la qualité et la richesse matérielle de ses pensionnaires obligés !
Tout avait pourtant bien commencé : arrivé de Paris, drapé de quelques assurances récoltées au gré de tes rencontres en semi-pénombre avec quelques rescapés d’une France-Afrique en déconfiture, tu pensais tenir le fil d’Ariane d’un mouvement populaire sans précédent, que tu entendais déverser sur un pouvoir chancelant, tâtonnant, immature. Tes contacts te l’avaient prédit : Ali Bongo, à la moindre étincelle, se sauvera toutes plumes dehors, tout peureux qu’il est de tenir plus à sa vie qu’au destin du peuple gabonais. Tu nous l’as dit, on t’a cru : tu as foncé. Napoléon Banaparte t’a pourtant mis en garde : « L’homme fait pour les affaires et l’autorité ne voit point les personnes ; il ne voit que les choses, leur poids et leur conséquences ».
En spécialiste de la déstabilisation des systèmes (ne te doit-on pas la décapitation du SEENA, la diabolisation de l’UPG et de la société civile, la mise en place d’un système sophistiqué d’insécurité policière au pays, la mise au ban des partis politiques de l’opposition, la mise à bas de l’éducation nationale par l’imposition d’un ridicule système « turn over » qui a considérablement désarticulé tout le système éducatif, etc.), tu pensais, en toute bonne foi, qu’en surfant sur la vague ivoirienne, en glissant sur le précédent tunisien et en réchauffant ta petite amie Gloria, tu réussiras à déclencher la déresponsabilisation des gabonais.
Mal t’en a pris, pauvre président. Les Gabonais se sont rappelés à ta mémoire : « non, AMO, tu n’es pas cet être neuf que tu prétends être ». Ton linge est encore sale, trop sale pour que l’on puisse croire en ta virginité soudaine. Ton ancienne peau est toujours visible ! 

Deuxième lettre ouverte au Président André Mba Obame 


Notre grand-père du fin fond de Medouneu, celui que tu connais si bien, a retiré la pipe de sa bouche, secoué lentement sa vieille tête qui en a vu d’autres et a soupiré : « non, décidément non, à beau mettre un tronc de bois dans l’eau, il ne se transformera jamais en crocodile ! »
Tous ceux qui t’entourent aujourd’hui, qui forment l’ossature de la défunte UN, tu les as humiliés à un moment ou un autre de ta turbulente carrière, tu leur a foutu des bâtons dans les roues pendant des années, moi y compris. Nous te regardons, toutes, tous et chacun, en faction : « poussons le, acclamons le, caressons son égo, laissons le bousculer le cocotier. Nous, on récoltera les fruits et à la fin, on le jettera dans un caniveau !» Myboto a-t-il oublié le pamphlet que tu as écrit contre lui, le qualifiant d’imposteur ?  



Chacun de nous affute ses armes pour te crucifier le moment venu. Car ce qui vous réunit, c’est le frustrant sentiment de votre inutilité actuelle devant la marche du pays. De savoir que vous qui avez toujours été aux commandes n’êtes plus si indispensables, que la République peut fonctionner avec des femmes et hommes neufs, inconnus et déterminés, est à vos yeux insupportable. 

Pour avoir été au sommet pendant si longtemps, tu as naturellement cru que le peuple était ce que tu voulais qu’il soit : une coquille vide. 


Tu as mis en place, au ministère de l’intérieur, un système électoral faisant du PDG une machine à gagner tous les suffrages, même avec une commission électorale indépendante. Aujourd’hui, tu es étonné que ça marche, et mieux sans toi ! N’as-tu pas déclaré, pendant ta campagne électorale, que tu avais emporté avec toi la clé de la fraude électorale, avouant de fait que tu étais le maître d’oeuvre de tout le système de fraude qui avait toujours fait du parti au pouvoir le vainqueur inélégant de toute campagne électorale ? Ben voyons, AMO !
Quel revers ! Le 25 janvier dernier, quand tu t’es autoproclamé Président, insultant et écrasant au passage la Constitution de la République gabonaise et tout le dispositif institutionnel qu’elle a fait émerger, le gouvernement de la République était à Tchibanga.


Première surprise : personne ne s’est déplacé, personne n’a paniqué. Aucun ministre, aucun sous-ministre, n’a daigné revenir précipitamment à la capitale pour gérer cette situation de crise extrême. Tu avais la ville pour toi, un palais présidentiel vide, tous les ministères vides. Après avoir juré que tu étais prêt à mourir pour le pays, tu as fui te cacher en fanfare au PNUD, te soustrayant du coup au mandat que tu venais de t’octroyer. Tous comptes faits, ta vie est précieuse AMO, plus précieuse que ce peuple. Car le Président de la République gabonaise gouverne le pays tête haute sur le territoire de la République gabonaise, pas expatrié dans une tour d’ivoire.


Deuxième surprise, le Gabon continue de fonctionner comme si de rien n’était. Tu es au PNUD, ça n’affecte personne : le Président ne change pas son agenda, il voyage, il revient, il part, il organise la vie administrative, il lance des chantiers ! Tout se passe comme si on avait pris acte que tu t’es oublié au PNUD.


Troisième lettre ouverte au Président André Mba Obame


En visant la déstabilisation de la première institution du pays, les auteurs de ces faits cherchent, à travers la mise en difficulté de la personne concernée, la déstabilisation du régime politique. Par rapport à cette visée clairement identifiée, les faits en cause tombent sous le coup des dispositions suivantes du code pénal gabonais :


-Tentative d’incitation à la révolte contre la personne du Chef de l’Etat – article 88


-Réception des fonds de l’étranger en vue d’une opération visant à déstabiliser les institutions du pays – article 89


- Complot pour attentat – article 68


- Désobéissance civile – article 75


- Détention de documents compromettants – article 90 


Qu’il est loin, ce temps béni où tu avais l’arrogance et l’éternité pour toi ! Que c’est violent, d’aujourd’hui constater que le manuel des procédures que tu as laissé au ministère de l’intérieur est brillamment utilisé.
AMO hurle au régime dictatorial au Gabon ? ai-je bien entendu où dois-je encore mieux nettoyer mes oreilles ? 


Président AMO,


Les Gabonais ont compris ce que sont des campagnes électorales : de grands moments de liesse populaires, où l’on distribue beaucoup de cadeaux. Très peu vont ensuite voter, car tu leur as appris que cela ne servait à rien. Tu as provoqué, de tout le temps que tu as mis au ministère de l’intérieur, la plus extraordinaire ruée vers l’abstentionnisme qu’on n’a jamais vu dans ce pays. Tu nous as dégouté de la politique, tu nous a enlevé toute fierté à l’usage d’un bulletin de vote.


Tu as cependant eu l’intelligence de comprendre qu’au rythme où vont les réformes dans ce pays, Ali Bongo n’aura pas besoin de 7 ans pour réhabiliter son nom avec les Gabonais. Tu le sais, quoi que tu en dises : ce travail de fond qui se fait, ces travaux qui sont lancés tous azimuts, ces réformes qui avancent même péniblement, cet air de restauration républicaine qui semble petit à petit s’installer, cette transparence dans les formes et le fond qui prend progressivement corps, tout cela t’effraie. Car tu comprends qu’il n’y aura plus de place pour tes tours d’illusion. Et la population semble suivre. Il y a longtemps qu’on n’avait pas vu des Gabonais se faire déguerpir sans qu’ils n’investissent les médias pour réclamer une énième indemnisation ! Il y a longtemps qu’on n’avait plus la sensation de voir des chantiers pousser dans le pays, comme des champignons. Il y a longtemps qu’on ne réfléchissait plus sur le destin de la nation : on laissait tout partir à vau l’eau, on s’en foutait.


Cela doit faire mal, très mal, de se savoir exclu du redémarrage du pays. C’est un pieu douloureux dans le coeur. Car tu resteras pour longtemps encore associé à la gabegie post 90 que ce pays a connu.


Chaque jour qui passe dévoile ta capacité de nuisance : aucune idée constructive, aucune proposition. Tu n’as jamais siégé à l’assemblée nationale pour laquelle nous t’avons élu, tu foules au pied toutes les règles institutionnelles, te considérant au-dessus des lois. Quel désastre que cette intelligence dévoyée !


Les Gabonais aujourd’hui se posent une seule question : tout ça pour ça?
Mrs Annie Mengue M’Obame, Ph.D
Deputy chairman of the board
Core, Davis & Winston Associates, Inc.
1815, Riggs Street, NW
Washington, DC.
annie.mengue@mail.com



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