Un phénomène mondial
Selon une étude effectuée en 2010, plus de 115 millions de veuves dans le monde vivent dans une extrême pauvreté. Cela représente près de la moitié des quelques 245 millions de veuves dans le monde.
Selon cette même étude, les plus touchées par la pauvreté sont les 2 millions de veuves afghanes, les 740 000 veuves irakiennes, les femmes ayant à leur charge leurs petits-enfants orphelins du sida et les veuves-enfants âgées de 7 à 17 ans. On y retrouve également les femmes d’Afrique chassées de chez elles avec leurs enfants et privées des biens de leur époux décédé.
En dehors des violences matérielles qu’elles subissent, ces veuves sont également victimes de nombreuses persécutions et discriminations : accusées de sorcellerie, violées, contraintes d’épouser un autre membre de la famille du défunt – lévirat - ou encore déshéritées et chassées.
Plus de 500 millions d’enfants de ces veuves vivent dans un environnement hostile, où ils peuvent être victimes de violences et de maladies. D’autres sont réduits à la servitude, privés d’éducation ou deviennent des cibles privilégiés de trafiquants d’être humains.
Une situation qui s’aggrave
La situation des veuves dans le monde devient plus alarmante chaque année en raison de la multiplication des conflits armés, des catastrophes naturelles, des violences ethniques, de la pandémie du VIH/SIDA, et de pratiques traditionnelles discriminantes. L’assassinat ciblé des hommes, qui caractérise nos conflits modernes contribuent également à une augmentation sans précédent du nombre de veuves. La situation est d’autant plus préoccupante que le phénomène touche les femmes de tous les âges, y compris les jeunes filles.
Par ailleurs, la crise financière actuelle et les conséquences déjà perceptibles du changement climatique dans certaines régions du monde ont dégradé les conditions de vie des plus pauvres et des plus vulnérables, notamment celles des veuves et de leurs enfants.
L’extrême pauvreté engendrée par la privation de droits élémentaires expose ainsi les veuves à l’exploitation économique et sexuelle, au trafic d’êtres humains, à la maladie et à des violences physiques et psychologiques.
Enfin, la pression exercée par les coutumes traditionnelles et religieuses dans certains pays empêche les veuves de s’exprimer librement sur les difficultés qu’elles rencontrent, par crainte de représailles de la part de leur entourage.
Les principales violences et discriminations à l’encontre des veuves
Dans de nombreux pays, le veuvage est associé à un véritable stigmate et est perçu comme une situation honteuse, associée parfois dans l’imaginaire collectif à la sorcellerie et à la prostitution. Dans certaines cultures, les veuves sont même considérées comme des personnes maudites qui attirent le malheur sur elles et sur leur entourage. Leur statut de paria les expose de fait à de multiples violences, dont le viol et le meurtre.
En 2006, une étude menée en Tanzanie avait révélée que près de 400 femmes âgées, principalement des veuves, avaient été assassinées car considérées comme des sorcières.
Les veuves sont également victimes de rites de deuil et de funérailles dans plusieurs groupes ethniques en Afrique et en Asie du Sud : « purification » forcée à travers des violences sexuelle, rasages des cheveux, scarifications, privation de certaines libertés, perte du statut social et spoliation de tous les biens.
Le déshéritement
Dans de nombreux pays, même lorsque la loi l’interdit, les parents mâles du défunt chassent la veuve de son foyer, saisissent sa terre, ses biens et même ses enfants, en justifiant ces spoliations au regard de la coutume et de la loi traditionnelle.
Les veuves sont ainsi livrées à elles-mêmes, s’enfoncent dans le cycle de la pauvreté et deviennent la cible de nombreux abus. Face à une telle situation, de nombreuses veuves n’ont souvent d’autre choix que de retirer leurs enfants de l’école pour les faire travailler, de mendier et de se prostituer. Dans des cas extrêmes comme en Irak et en Afghanistan, les veuves sont forcées au suicide.
Les principales violences et discriminations à l’encontre des veuves
Le remariage
Dans les communautés hindoues (en Inde, au Népal ou encore au Sri Lanka), les veuves n’ont pas le droit de se remarier. Ailleurs au contraire (en Irak et en Afghanistan), les veuves peuvent être données à un proche de leur mari. Il y a eu des cas précis à Kaboul ou des femmes ont été emprisonnées, officiellement pour les protéger, car elles avaient fui un remariage forcé avec un frère ou un cousin de leur époux défunt.
Dans de nombreux pays d’Afrique (Kenya, Malawi, Zambie, Zimbabwe, Nigeria et Afrique du Sud), le nombre de mineures mariées à des hommes âgés a augmenté. Cette situation s’explique en partie à cause de la croyance qu’avoir une relation sexuelle avec une vierge peut protéger du VIH/SIDA, et en parti parce que ces jeunes filles espèrent échapper à la pauvreté.
La pauvreté amplifie ce phénomène de remariage qui se répète d’une génération à l’autre. Des veuves vivant dans la pauvreté, incapables de subvenir aux besoins de leurs filles, en viennent à considérer qu’elles n’ont d’autre choix que de vendre ou de marier leurs filles, souvent à des hommes veufs bien plus âgés. Lorsque cet homme meurt, la jeune veuve est à son tour soumise à de nombreuses discriminations.
Les conflits et les situations post-conflits
Les veuves représentent des victimes particulièrement vulnérables lors des conflits armés et dans les situations de post-conflits où elles constituent souvent la majorité des déplacés et de réfugiés. Ne bénéficiant généralement d’aucune protection, elles sont des cibles faciles pour l’exploitation sexuelle et le viol comme dans l’est de la RDC et au Burundi. De surcroît les veuves ont moins de chances de pouvoir retourner dans leur village et d’être réhabilitées dans leurs droits car elles sont souvent incapables de fournir un titre légal de propriété ayant appartenu à leur mari. Ce fut le cas en Bosnie et au Kosovo lors des conflits des Balkans dans les années 1990.
Par ailleurs, leur situation n’est généralement pas prise en compte dans les programmes de reconstruction post-conflit car elles ne peuvent se faire entendre ni organiser en association pour défendre leurs droits.
Un accès limité à la justice
Même si certains Etats ont la volonté de protéger les veuves, la faiblesse du système judiciaire compromet de fait la défense de leurs droits. Des études au Rwanda et en Ouganda ont démontré que les veuves évitent d’avoir recours à la justice pour demander réparation des discriminations qu’elles subissent par crainte de la réaction du système judiciaire et de la société. Cette situation est aggravée par le manque de sensibilisation des magistrats et des juges à ces problèmes, auquel s’ajoutent fréquemment des préjugés concernant les plaintes déposées par des femmes.
Sources: Fondation SYLVIA BONGO ONDIMBA
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