Wikileaks vient, en quelque sorte, de confirmer l’analyse faite par le Dr. Daniel Mengara à son retour du Gabon en septembre 2009 suite aux élections présidentielles. A peu de chose près, son analyse est la même que celle présentée par l’ambassadrice américaine Reddick dans les cables ci-dessous rendus publics par Wikileaks.
En gros, sur un ton irrité, l’ancienne ambassadrice des Etats-Unis au Gabon s’étonne de l’ineptie généralisée de l’opposition gabonaise au moment où les USA semblaient attendre de cette opposition une action de protestation de nature à défaire le régime en place. L’ambassadrice semble penser que l’opposition s’est illustrée par son silence total et, en fait, sa sorte de cession volontaire à Ali Bongo du pouvoir.
Les vidéos du Dr. Daniel Mengara suite à ses rencontres avec les divers leaders de l’opposition, et les conclusions qu’il en tire, sont disponibles ici dans des liens ci-dessous, après le texte de Wikileaks.
Il ne reste plus qu’à espérer que ces révélations seront de nature à clarifier pour tous les intentions des uns et des autres, au moment où la société civile s’active actuellement au Gabon à essayer de secouer la léthargie presque maladive de l’opposition politique au Gabon. Saura-t-elle enfin se poser en alternative crédible? Rien n’est moins sûr car l’ambassadrice américaine semble penser que ni Mamboundou ni Mba Obame n’ont jamais vraiment voulu en découdre avec Ali Bongo, un peu comme si, par leur silence et inertie, ils avaient quasiment offert le pouvoir à Ali Bongo sur un plateau d’argent.
Lisez et faites-vous une idée de tout cela vous-même.
Triste Gabon quand-même…
VERSION FRANCAISE
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L’OPPOSITION NE FAIT RIEN
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¶ 2. (C) Aucun des candidats à la présidentielle n’a pu esquisser un plan cohérent pour contester efficacement l’inauguration vraisemblable d’Ali Bongo en tant que président. L’ambassadeur a rencontré les candidats, Pierre Mamboundou de l’UPG, Bruno Ben Moubamba (indépendant) et Yvette Ngwevilo Rekangalt (Indépendant) après la proclamation des résultats des élections. Tous ont protesté contre les résultats annoncés, mais aucun n’a de façon coherente articulé une stratégie de mobilisation du public pour le soutient de leur cause.
¶ 3. (C) Quand nous avons demandé quels sont ses plans pour s’opposer aux résultats des élections, Mamboundou, le plus ancien et mieux connu des membres de l’opposition au Gabon, a levé ses mains et haussé les épaules en disant: “Que pouvons-nous faire?” Mamboundou n’a pu parler des plans de l’UPG qu’en vagues généralités, se plaignant que c’était la troisième élection qu’un membre de la famille Bongo lui vole. Lors de la réunion, Mamboundou ne s’est pas engagé de dire si l’UPG allait formellement soumettre un recours contre les résultats, à la cour constitutionnelle. Alors qu’il affirmait qu’un tel recours était probable, il ne pouvait fournir aucun détail.
Le 17 Septembre, l’UPG a déposé son recours sur la base d’accusations de fraudes dans 67% des bureaux de vote, mais nos contacts au sein de l’UPG ne sont pas optimistes quand au succès de leur requête.
¶ 4. (C) Rekangalt et Moubamba, les deux candidats mineurs aux élections, ont parlé en général d’idées visant à mobiliser le public pour s’opposer à Ali Bongo. Pressé de fournir plus de détails ou de donner un calendrier, aucun d’eux n’a pu être spécifique. Rekangalt a dit qu’elle soumettrait un recours aux élections basé sur la question des origines d’Ali Bongo et la rumeur très répandue qu’il ne soit pas gabonais de naissance et par conséquent, inéligible à la présidence. Moubamba était sceptique au sujet du rôle de la cour constitutionnelle et n’avait pas du tout l’intention de soumettre un recours. Moubamba, qui a présenté un bon nombre d’arguments intelligent contre l’hégémonie du PDG, a quitté Gabon le 13 Septembre pour la France et les Etats-Unis, où il sera porte-parole international de l’opposition, un geste qui effacera la popularité qu’il a obtenu pendant sa campagne et sa grève de la faim.
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Un silence assourdissant
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¶ 5. (C) Ni Mamboundou, André Mba Obame (candidat indépendant qui a également obtenu plus de 25% des voix), ni aucun autre candidat de l’opposition ne s’est présenté en public ou énoncé un message clair a l’endroit du public après les élections. Tous les candidats ont dit à l’ambassade qu’ils n’avaient pas de plans immédiats pour des sorties publiques. Ils ont chacun attribué le silence de l’opposition aux restrictions imposées par le gouvernement gabonais aux media de radiodiffusion et de presse écrite et l’omniprésence permanente des forces de sécurité à travers Libreville pour dissuader tout rassemblement public. Mamboundou et l’opposition ont été éloquemment silencieux dans les jours chaotiques qui suivirent les élections, lorsque des manifestants descendirent dans les rues de Port-Gentil. Ce silence a continué, avec pour conséquence que de nombreux gabonais désormais jugent l’opposition inefficace ou désintéressée.
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QUI VA SE LEVER ?
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¶ 6. (C) A ce stade, il n’y a pas encore de successeur pour prendre la relève de leader de l’opposition. Mamboundou est vieillissant et sa santé est mauvaise. André Mba Obame, très populaire dans les zones dominées par l’ethnie Fang, n’a pas rallié le reste du pays à sa cause. Les 13 autres candidats indépendants n’ont pas de parti structuré ou un soutien au-delà de leurs équipes de campagne. Les autres personnalités mineures de l’opposition sont considérées par la population, soit comme corrompues, ou secrètement alliées du parti au pouvoir et inefficaces, soit une combinaison de tout ce qui précède. En conséquence, il ya une absence de leadership croissante dans l’opposition. Contrairement au parti au pouvoir, il n’y a pas d’héritier dans l’opposition.
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COMMENTAIRE
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¶ 7. (C) L’incapacité de Mamboundou d’être un leader pendant les jours critiques qui suivirent l’annonce des résultats des élections, a été un mauvais précédent pour le reste de l’opposition désorganisée. Même le décompte publié par le gouvernement a donné à l’opposition plus de 55% des voix, une indication de l’impopularité d’Ali Bongo Ondimba et du parti au pouvoir. Cependant, les divisions dans l’opposition pourraient s’approfondir davantage, la rendant incapable de capitaliser sur les faiblesses d’Ali Bongo, et de représenter les intérêts de la population. L’inefficacité de l’opposition continue de permettre au PDG de maintenir sa dominance sans aucune pression significative d’améliorer la gouvernance, de résoudre les problèmes sociaux et améliorer les performances économiques. L’UPG peut espérer qu’au minimum, les recours en annulation forceront la cour constitutionnelle à retarder d’un mois l’inauguration d’Ali Bongo. Même s’ils pensent que cette action est futile, tout court-circuitage de la procédure par Ali Bongo démontrerait qu’il n’a pas d’égards en ce qui concerne l’état de droit.
FIN COMMENTAIRE.
Reddick
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